dimanche 20 juin 2010

Making Your Amends To The Dead



Le problème, avec les all-star bands, c'est que l'on s'imagine que ça va forcément cartonner. Parce que tous les éléments sont réunis pour que le succès soit indiscutable.
Et puis, c'est le fantasme de tous les afficionados un peu éclairés sur le sujet ; qui n'a jamais spéculé sur le groupe ultime, celui qui se composerait de tous nos artistes tant aimés, "Vous prendrez bien un peu de Tommy Lee à la batterie ?" et "Oh tiens ! Si on se prenait un petit Ozzy de derrière les fagots pour les vocals ?".
Enfin bref, le all-star band est une manne qui attisera forcément curiosité et intérêt.
L'émission Headbangers' Ball sur MTV en fait son principe, on a vu les Velvet Revolver, et ses transfuges des Guns'n'Roses, menés par le reptilien Scott Weiland, de Stone Temple Pilots.

A Perfect Circle, c'est un peu la quintessence de l'indé réunie en un mégaband qui détonne.
On reconnaît tout d'abord la voix et l'âme du groupe, Maynard James Keenan, chanteur de Tool, qui ici, s'éloigne de la bestialité et de la lourdeur de sa formation originale pour flirter avec des rivages plus clairs.
Puis Billy Howerdel, guitar tech pour Nine Inch Nails, The Smashing Pumpkins ou les Guns notamment.
Josh Freese, batteur des Vandals, puis de nombreuses formations telles que Nine Inch Nails, Suicidal Tendencies et j'en passe.
Troy Van Leeuwen, artiste multi-instrumentiste crédité sur de nombreux albums de néo-métal (Coal Chamber, Crazy Town, KoRn), il pallie au départ du géniallissime Nick Olivieri des Queens Of The Stone Age, en devenant un membre pilier de la formation.
Et puis, Paz Lenchantin, artiste d'origine argentine, qui officie à la basse et au violon, a collaboré à l'album "Song For The Deaf" des QOTSA et accompagne Melissa Auf Der Maur sur quelques titres de son premier album éponyme.
James Iha, guitariste, transfuge des Smashing Pumpkins.
N'oublions pas l'acolyte maléfique de Marilyn Manson, Jeordie White (Twiggy Ramirez) qui, délaissant ses frusques de petite fille dégénérée, remplace au pied levé la belle Paz à la basse.

Ce qui fait l'efficacité du groupe, c'est bien entendu l'apport de Maynard James Keenan, hurleur en chef de Tool, qui ici, fait preuve d'une certaine maîtrise pour nous délivrer des émotions plus proches de nous, tandis que Tool avait l'habitude d'un panel de sensations plutôt distanciées, âpres à l'écoute, et auxquelles il est souvent difficile d'adhérer à la première oreille tendue, tant la musique y est dense et étirée au maximum.
Le premier album, "Mer de Noms", sorti en 2000, étaye un rock frondeur, puissant, avec des moments d'accalmie qui prélude à une haine encore plus féroce.
Des titres comme "The Hollow" et "Judith" (portée par le clip haletant de David Fincher), montrent un crescendo saisissant. La sublime ballade " 3 Libras" évoque les harmonies que l'on retrouvera plus sur l'album suivant, "Thirteenth Step", sorti en 2003.
L'album connaît un certain apaisement, des chansons comme "The Package" ou "The Noose" témoignent d'un mysticisme qui leur va comme un gant.



L'année 2004 voit la sortie de l'album "eMOTIVE", album entièrement composé de reprises, avec en prime, une chanson originale, "Passive" qui rappelle les grandes heures de "Mer de Noms", dotée d'une intensité mélodique pareille à celle de "Judith" ou "Orestes".
L'intérêt de l'album est plutôt relatif, même si l'on distingue des perles telles que la reprise de Marvin Gaye, "What's Going On" et "Peace Love And Understanding" de Nick Lowe.

La qualité du groupe est indiscutable, tant et si bien (je vous fais part de mon expérience personnelle bouuuh! ^^) que ma première écoute, qui dura au bas mot 20 secondes, me fit adhérer au groupe de manière immédiate et définitive. C'était "Weak And Powerless" et je dois admettre que l'on s'en remet difficilement.
Depuis 2004, plus de nouvelles du groupe.
Et, je découvre aujourd'hui, dans mes fouineries internet quotidiennes, une petite news qui fait plaisir ; en effet, sur le site BLABBERMOUTH.NET, on peut lire ceci, daté du 18 juin 2010 :
"According to The Pulse of Radio, A PERFECT CIRCLE, the band featuring TOOL's Maynard James Keenan on vocals and Billy Howerdel on guitar, seems like it's definitely coming back to life again after a six-year hiatus. Howerdel's band ASHES DIVIDE performed at Hollywood's Viper Room on Wednesday night (June 16), where Howerdel told the Antiquiet that a full album and tour were possible for A PERFECT CIRCLE, and that the band was working on "something" that should be out later this year.

Keenan hinted to The Pulse of Radio a while back that A PERFECT CIRCLE might release new music, although not necessarily an entire album. "I doubt if we'll do any touring or, you know, do a full album," he said. "We might do some one-off shows here and there if the timing's right and it seems like a good vibe and a smart thing to do. But most likely we'll just kind of concentrate on, you know, one or two songs at a time, rather than investing all the time and money and effort into making those plastic discs that no one cares about anymore." "


Peut-être que, dans un avenir proche, verra-t-on le retour d'un des meilleurs groupes émergé de ses années 2000 folâtrant gaiement dans l'Eurodance et les télé-crochets.
Espérons que l'état d'orphelin dans lequel nous nous trouvons présentement se dissipera bientôt.
Mes agneaux, je vous salue.


Emmanuel D.

2 Psaumes:

De Profundis a dit…

Deux substances me semblent essentielles à la conception d'un album : d'une part la composition, d'autre part le mixage. Avec A Perfect Circle, je m'avance au bord d'un précipice, mais ce n'est pas celui de l'extase dans lequel j'aimerais me jeter pour jouir de la chute, mais celui de la frustration. Car d'un côté les compositions du groupe sont originales et intéressantes, et les paroles de MJK sont à l'image de ce qu'il faisait avec Tool (de mon point de vue très bien écrites, souvent poignantes, quoique très inégales), mais la faiblesse des nuances sonores m'empêche de m'engouffrer dans ce cercle comme je le faisais autrefois dans les groupes respectifs de ses membres.

Le défaut majeur de ce Perfect Circle est clairement le mixage. Alan Moulder a choisi un son à la My Bloody Valentine ou Placebo, c'est-à-dire un son plutôt mauvais, qui ne parvient pas à donner au projet une cohésion sonore uniforme et harmonieuse - frustrant si on le compare à son travail avec les Smashing Pumpkins, Gary Numan ou NIИ. Le son est sec, sans profondeur, mal équilibré, la stéréo peu judicieusement utilisée, et je ne parlerai même pas de la batterie qui m'est totalement insupportable, digne des pires cliché-bands de rock pour adolescents.

Force, intensité, pénétration, tout ce caractère prodigieux qui aurait pu être présent s'il n'était pas balayé par une insuffisance sonore manifeste, qui fait passer les morceaux du groupe largement à côté de mes oreilles, pourtant amplement abordables. Après plusieurs tentatives, j'abdique ; ce cercle n'est définitivement pas parfait pour moi. J'en lirai les paroles comme des poèmes, avec en fond les Ghosts de Reznor, qui lui a su en vieillissant rester beaucoup plus judicieux que d'autres !

Anonyme a dit…

Eh bien eh bien ! Que répondre à tout ça ? ^^
J'avoue, ta conception est plutôt fine et fortement bien analysée.
Je pense que Keenan voulait s'éloigner de l'image martiale et hyer-complexe de Tool pour faire quelque chose de plus "doux" à recevoir, pas mainstream, mais accessible.
Tu as sans doute raison, concernant la prod', je ne m'aventurerai pas sur ces terrains (par manque flagrant de connaissances ^^). La seule chose que je peux dire, c'est que la différence se fait au niveau du ressenti, et je pense que MJK a avant tout misé là-dessus, et sur sa part de "féminité", qui contrebalance la "masculinité" de Tool :)